Aider les chercheurs américains ou courir à la chasse aux Prix Nobel?

Ainsi donc, beaucoup de pays d'Europe, la France en première ligne, se proposent d'accueillir tous les chercheurs américains licenciés par l'administration Trump ou privés par celle-ci des moyens de poursuivre leurs travaux.

On a les larmes aux yeux devant tant de solidarité internationale, qui est sans aucun doute motivée par un attachement sans faille à la science et aux chercheurs, à leur "liberté académique" de penser et de chercher sans aucune contrainte ni dirigisme.

Il faudrait vraiment avoir un mauvais esprit pour imaginer qu'une motivation importante d'une telle démarche pourrait être d'attirer chez nous des chercheurs appartenant à la communauté scientifique la plus productive du monde, comme le souligne la profusion de Prix Nobel et autres distinctions moissonnées par les chercheurs américains depuis plus d'un siècle - qui est directement liée aux importants moyens mis à leur disposition..

Et, encore plus pervers, pour noter que si des moyens sont dégagés pour cet accueil de chercheurs américains, ils feront défaut pour le recrutement et le déploiement des carrières de nos propres jeunes chercheurs et diplômés, qui sont déjà, et depuis des décennies, fort insatisfaisants, quand ce n'est pas scandaleux.

Et pour souligner que, sans atteindre loin de là le niveau des attaques actuelles aux USA, la recherche en France et dans la plupart de l'Europe fait elle aussi l'objet de menaces et attaques directes

Ce lundi 5 mai, se tiendra à l’Académie du Climat, 2 place Baudoyer, 75004 Paris, de 14h à 15h30, une conférence de presse sur les annonces du chef de l’Etat concernant le lancement de la plateforme "Choose France for Science", qui est supposée faciliter l’accueil de scientifiques en exil. Elle sera retransmise en direct: 

https://youtube.com/live/XfHEwimgrsQ?feature=share 

et enregistrée pour une diffusion ultérieure.

Les interventions seront ouvertes à toutes et tous, sans inscription préalable. Elles seront suivies d’une séance de questions-réponses, avec priorité aux journalistes présents. 

Cette conférence de presse sera l’occasion de réagir aux annonces sur la base du manifeste du Réseau "Stand Up For Science France", signé par plus de 8000 personnes,

https://standupforscience.fr/tribune/

qui affirme l’urgence pour la science et la démocratie de déployer, en France et en Europe, des moyens de résistances durables à la hauteur des attaques qu’elles subissent dans le monde, et énonce un ensemble de priorités :

• accueillir des scientifiques menacés en exil et appuyer tous les mouvements de résistance sur place; 
• héberger et préserver les programmes internationaux et les bases de données qui sont supprimées ou menacées dans le monde et en particulier aux Etats Unis; 
• en France, renforcer la liberté académique par des postes pérennes, ouverts en nombre, dans toutes les disciplines; 
• protéger la recherche et l’Université des ingérences des pouvoirs politiques, économiques et religieux; 
• relancer l’investissement public dans la recherche et l'Université; 
• ouvrir des revues scientifiques sous le contrôle de la communauté académique.  

Les quatre derniers points de ce programme concernent la France et l'Europe, qui n'ont pas attendu Trump pour s'attaquer aux libertés académiques, à la recherche et aux chercheurs. Ceux-ci ont mis longtemps à réagir et on ne peut que se réjouir de leur mobilisation actuelle.

Alain Dubois

5 mai 2025