L'Herbu

Le blog d'Alain Dubois, Saturnin Pojarski et Augustin Lunier

Miracle: la multiplication des cochons

Miracle: la multiplication des cochons

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La Présidentielle ne leur a pas suffi! Les trois petits cochons Hamon, Arthaud et Besancenot, terrorisés par le Grand Mélanchoup, ont réussi à empêcher celui-ci d'accéder au deuxième tour de la Présidentielle et nous ont imposé cette équation impossible à résoudre, choisir entre Macron et Le Pen. Croyez-vous qu'ils en ont tiré les leçons? Que nenni. Ils sont encore plus nombreux cette fois à vouloir obtenir le même résultat. Pourtant, tout citoyen se considérant comme faisant partie du "peuple de gauche" devrait comprendre qu'il n'y a que deux attitudes cohérentes face à ces élections: le vote Mélenchon ou l'abstention.

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Face aux "élections" européennes, destinées à tenter de donner une fois de plus les moyens de fonctionner aux institutions européennes, ennemies des peuples, des travailleurs, de l'environnement, de la santé et de la paix, une seule attitude serait justifiée: celle consistant à organiser un boycott de ces élections à l'échelle européenne. C'est-à-dire empêcher celles-ci de se tenir en bloquant l'accès aux bureaux de vote ou, mieux, en organisant la grève générale ce jour-là. Mais pour ce faire, il faudrait pouvoir mobiliser des forces militantes considérables, qui n'existent nulle part - ce qui n'a rien d'étonnant, vu l'état de déliquescence des organisations ouvrières et révolutionnaires dans toute l'Europe, produit de décennies de renoncements, de reculs et d'échecs dont la combinaison des impasses stalinienne, social-démocrate, anarchiste et trotskiste est responsable.

Il est donc fallacieux d'appeler au "boycott" de ces élections dans la mesure où nul ne peut concrétiser ce mot d'ordre.

Que faire alors? S'abstenir ou voter blanc, version "soft" du boycott  ? Ou voter pour l'une quelconque de ces listes dites "de gauche", "radicales", "alternatives", "non-alignées" ou "citoyennes"? Ou encore pour des "écolos" (ceux qui croient depuis des décennies qu'on pourrait "sauver la planète" en "réformant" le capitalisme mais sans le détruire, car alors ce serait le retour du couteau entre les dents).

Et chacun d'écouter avec le plus grand sérieux les "arguments" et "propositions" des uns et des autres, afin d'être bien sûr de faire le "meilleur choix" dans ce grand marché de la "contestation" (un mot-piège de mai 68, qui s'opposait de plein front à celui de "révolution" ou de "prise du pouvoir").

L'expérience de la dernière présidentielle n'aura donc pas suffi! La dispersion des "vraies voix de gauche" entre les 4 candidats Mélenchon, Hamon, Arthaud et Besancenot avait permis de manquer l'immanquable opportunité historique, ouverte par l'exceptionnelle "affaire Fillon", de faire accéder au deuxième tour, pour la première fois depuis des décennies, un candidat représentant, au moins en partie, les vrais intérêts des travailleurs et des populations - accession qui par elle-même, et nonobstant la politique qui aurait été menée par un gouvernement Mélenchon, aurait dialectiquement ouvert une nouvelle période historique pré-révolutionnaire en France, en Europe et dans le monde.

Mais non, tout ce beau monde n'en a tiré aucune leçon. Il est pathétique de constater, dans cette sombre époque de l'effondrement planétaire en cours de notre civilisation, l'effondrement de la pensée individuelle et collective qui l'accompagne.

La "démocratie" dont tout le monde se gargarise consisterait-elle à donner à chacun le choix de son vote en fonction de ses "goûts"? Comment des "adultes" peuvent-ils considérer que les critères de décision dans ce domaine sont du style "il/elle m'est plus sympathique", "il/elle est jeune", "il/elle est beau/belle", "il/elle parle bien", "c'est une femme", "Il/elle appartient à une minorité ethnique, raciale, sexuelle, etc." - sans se poser la question des conséquences politiques du vote pour tel ou telle? Vote-t-on pour "se faire plaisir" ou "être en accord avec les idées d'un(e) candidat(e)" ou s'agit-il d'une action politique, qui doit être guidée par des objectifs politiques et non pas psychologiques?

Dans la situation concrète qui prévaut aujourd'hui, le seul parti "de gauche" qui a su construire une dynamique et une force depuis des décennies est le mouvement des insoumis. On peut le déplorer ou s'en réjouir, mais c'est un fait. Dimanche qui vient, tout vote "de gauche" autre qu'un vote "insoumis" sera une insulte aux millions de combattants qui ont obtenu le droit de vote pour nous. Certes, Mélenchon s'est tiré une énorme balle dans le pied en s'avérant incapable de se comporter dignement face à la provocation de la perquisition chez lui et au siège de son parti. Mais ce n'est pas le seul signe inquiétant le concernant. Il avait déjà donné bien des signes des limites de son langage "radical" en refusant, par souci de "respectabilité" (bien mise à mal ensuite lors de la perquisition), d'appeler à la grève générale contre la loi travail puis contre la destruction du statut des cheminots, pour emboîter le pas aux organisations syndicales dans leur absence d'organisation effective de la résistance face à ces attaques sans précédent depuis la guerre contre les droits sociaux, et se ranger à la mascarade des manifestations "de protestation". Et la fraîcheur et la lenteur de son soutien au remarquable mouvement des gilets jaunes, nouveauté historique majeure, a donné toute la mesure de sa méfiance vis à vis des mouvements issus des profondeurs du peuple exploité.

Mais la question n'est pas là. Il ne s'agit pas de se bercer de chimères sur les insoumis, mais d'évaluer l'impact qu'aurait sur la lutte des classes en France une "troisième place" (pour employer le langage "sportif" abject des médias) des insoumis dans le scrutin de dimanche. Bien entendu, voter pour la liste insoumise ne signifie pas avoir la moindre illusion sur les merveilles que ceux-ci pourraient faire s'ils accédaient au pouvoir, ou sur leur capacité à mettre un frein à la destruction accélérée des acquis sociaux et des conditions écologiques de vie sur cette planète.  Mais toute voix pour eux sera une voix à la fois contre Macron et Le Pen, tandis que toute voix pour les autres petits cochons sera un soutien à ces deux frères ennemis, en augmentant d'un point leur avance sur la seule liste susceptible de les menacer, même de loin, lors de ces élections pièges à cons.

 

Alain Dubois

23 mai 2019

 

 

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