Le blog d'Alain Dubois, Saturnin Pojarski et Augustin Lunier
2 Avril 2025
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La propagande éhontée déployée ces derniers jours dans bon nombre de médias, notamment audio-visuels, contre le système judiciaire dans notre pays, mériterait une réponse collective ferme des citoyens de soutien à celui-ci.
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La séparation des pouvoirs est un des fondements des Constitutions habituellement considérées comme « démocratiques ». Celles-ci distinguent (1) le pouvoir législatif, exercé par un parlement élu par les citoyens, qui adopte les lois mais également contrôle le bon fonctionnement des deux autres pouvoirs, (2) le pouvoir exécutif, exercé par un gouvernement, élu par les citoyens ou nommé par le parlement, habituellement dirigé par un chef de l’État, qui promulgue les lois et contrôle l’administration, la police et l’armée, et (3) le pouvoir judiciaire ou juridictionnel, nommé par l’exécutif et/ou le parlement, qui veille au respect et à l’application des lois. Tout État dans lequel l’indépendance et le fonctionnement de ces trois pouvoirs ne sont pas respectés, ne saurait être considéré comme démocratique.
Le concept de séparation des pouvoirs, dans sa conception dominante actuelle formulée clairement par Montesquieu dans L’esprit des lois, a pour fonction principale de limiter le pouvoir politique afin d’en limiter les abus, et de permettre son contrôle ultime par les citoyens.
On parle parfois de deux autres pouvoirs, le pouvoir médiatique et le pouvoir monétaire, qui ne sont pas reconnus comme tels par les Constitutions mais qui jouent un rôle important dans le fonctionnement réel des sociétés. Or il est frappant que le premier d’entre eux joue un rôle croissant dans celui-ci depuis le milieu du 20e siècle, devenant quasiment un quatrième pouvoir fondamental Traditionnellement exercé par la presse, puis par les médias audiovisuels, le pouvoir médiatique est aujourd’hui contrôlé avant tout par ces derniers et par les réseaux sociaux électroniques. Le rôle de ce pouvoir est devenu de plus en plus déterminant dans les régimes politiques dits démocratiques, dans lesquels les acteurs des pouvoirs législatif et parfois exécutif sont en définitive élus par les citoyens. La distinction entre information et propagande est devenue de plus en plus floue, et la pression exercée par les médias sur l’impalpable « opinion publique », mais surtout sur les votes de citoyens, est devenue prédominante. Le contrôle de la qualité et de l’honnêteté de l’information livrée à ceux-ci, qui est censé être effectué par les médias, est de plus en plus déficient.
En France, ces derniers jours, la puissance du pouvoir médiatique a atteint des sommets exceptionnels, notamment dans les médias audio-visuels traditionnels, qui ont quasiment « inventé » une colère des citoyens à l’égard du pouvoir judiciaire. Les cris d’orfraies à l’égard de ce dernier qui se sont multipliés notamment sur de nombreux plateaux audio-visuels, qui donnent une publicité éhontée à des déclarations politiques de dénégation de la culpabilité de condamnés en raison de la prétendue « importance » de ceux-ci, et consacrent de plus en plus de temps d'antenne à des intervenants portant ces messages, sont d’autant plus choquants qu’ils ne reflètent manifestement pas les sentiments partagés spontanément par la majorité des citoyens de notre pays, qui sont attachés à la qualité, l'honnêteté et l'impartialité de la justice. Que ces manipulations parviennent à influencer, dans un sens bien précis, non seulement des déclarations mais encore des décisions de responsables politiques et judiciaires, est particulièrement préoccupant. Ce n’est certes pas la première fois que cela se produit, mais cette fois-ci c’est tellement visible qu’on serait en droit d’attendre une réaction salutaire de condamnation populaire de ces manipulations, non seulement sous la forme de pétitions et de manifestations, mais encore, dans certains cas, de démarches judiciaires.
Alain Dubois
2 avril 2025